Le souffle du musicien forme un jet d'air qui, en sortant du canal, intéragit avec la colonne d'air dans la perce (le tuyau) de l'instrument, et se met à osciller autour de l'arête du biseau, comme le montrent les images ci-dessous.
L'interaction entre l'embouchure et la colonne d'air de la flûte à bec |
L'oscillation de la lame d'air autour du biseau. (Photos : Université d'Eindhoven, Pays Bas) |
Cliquer ici pour voir des vidéos correspondant aux images ci-dessus
Il y a des explications plus complètes sur le jet d'air dans un texte d'A. Hirschberg (en néerlandais) avec schéma & vidéos.
Cliquer ici pour voir un gros plan sur le profil du canal de la flûte à bec
Les molécules d'air contenues dans le tuyau d'un instrument à vent sont comparables à une rangé de pendules qui se touchent. Lorsque le premier reçoit une impulsion, il la transmet au suivant, et elle descend ainsi jusqu'au bout de la ligne. Lorsqu'elle atteint le dernier, celui-ci rebondit et la renvoit en sens inverse, puis le cycle recommence comme le montre cette animation.
La perce (le tuyau) de la flûte à bec contient donc une colonne d'air qui
se met à vibrer sous l'influence de l'oscillation de la lame d'air de part et d'autre du biseau lorsque l'on souffle dans l'instrument. Cette vibration parcourt l'instrument dans
le sens longitudinal et dans un mouvement d'aller-retour, qui s'organise de la manière suivante :
A chaque extrémité il y a un ventre de vitesse (V), qui est une zone de mouvement intense et de basse pression (en bleu clair dans les
images qui suivent), où les molécules d'air se déplacent rapidement, et au milieu il y a une zone d'immobilité et de haute pression (en marron dans
les images) appelé noeud de vitesse (N). Nous verrons plus bas que ce système possède d'autres modes de vibration, où il se divise en deux, trois
ou quatre parties, ou même davantage.
L'animation suivante montre comment cela se passe. Les ondes qui parcourent le tuyau de haut en bas et de bas en haut se croisent au noeud, rebondissent aux extrémités et repartent en sens inverse
pour rebondir à nouveau dans un mouvement de va et vient qui sera entretenu tant que le musicien souffle dans l'instrument.
La colonne d'air possède en réalité plusieurs modes de fonctionnement tous présents en même temps. Ce sont les registres,
qui correspondent aux partiels (ou harmoniques) qui se superposent pour composer le timbre de l'instrument.
Le graphique ci-dessous à gauche révèle le spectre sonore du la grave (3e doigté) d'une flûte alto baroque, et permet de visualiser la fréquence et
l'amplitude des différents partiels, chacun représenté par un pic.
Le premier (a gauche) est dominant. C'est la note que nous entendons (la fondamentale). Les autres l'enrichissent et caractérisent son timbre.
Le spectrogramme à droite donne une représentation visuelle en temps réel des différentes fréquences ( les partiels) qui composent cette note lorsqu'elle est jouée sur le même instrument. Chaque trait horizontal représente
un partiel en partant du bas (la fondamentale), l'intensité de chacun étant indiqué par sa couleur. Le timbre analysé dans ce diagramme résulte à la fois du profil du tuyau et de la géométrie
du canal.
L'utilisation des premiers partiels nous permet de jouer sur une tessiture de plus de deux octaves. Des explications suivent pour certaines notes d'une flûte à bec alto baroque en fa. Cliquer sur chaque image ci-dessous pour des informations plus détallées
fa grave (1e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
Nous pouvons raccourcir la colonne d'air en ouvrant des trous, ce qui permet de faire entendre des notes plus
aiguës, la distance parcourue par le mouvement d'aller-retour étant plus courte. Nous pouvons évidemment la rallonger de nouveau en fermant des trous.
Si les trous étaient suffisamment gros, les ouvrir équivaudrait à couper complètement la colonne d'air
vibrante à leur niveau, mais sur la flûte à bec ils sont trop petits pour cela. C'est la raison pour
laquelle nous pouvons employer les doigtés de fourche (ouvrir un trou et en refermer un ou plusieurs
derrière) pour obtenir notamment les demi-tons.
la grave (1e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
si grave (doigté de fourche - 1e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
ré grave (1e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
Nous pouvons ainsi jouer plus d'une octave, jusqu'au sol (un doigté de fourche sur les flûtes à bec de type baroque)
sol médium (doigté de fourche - 1e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
A l'inverse, nous pouvons rallonger de nouveau la colonne d'air en bouchant les trous, pour faire sonner des notes plus graves.
Ensuite, pour jouer des notes plus aiguës nous pouvons neutraliser le premier partiel, et forcer la colonne d'air à se
diviser en deux parties (à la flûte à bec cela se fait en provoquant une fuite au trou
du pouce). Il y a maintenant 2 noeuds de vitesse et la distance parcourue par le mouvement d'aller-retour est encore plus
courte. Cela nous permet de réutiliser les mêmes trous pour d'autres notes. Nous utilisons alors le deuxième registre
de l'instrument, pour lequel la colonne d'air comporte deux noeuds de vitesse.
la médium (2e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
En pratiquant 2 fuites (au trou de pouce et à l'un des trous au-dessus, nous pouvons neutrraliser les deux premiers partiels et forcer la colonne d'air
à se diviser en 3 parties pour obtenir des notes encore plus aiguës en réutilisant de nouveau les mêmes trous.
Nous utilisons alors le troisième registre de l'instrument, pour lequel la colonne d'air comporte trois noeuds de vitesse.
mi aigu (3e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
En pratiquant 3 fuites (le trou de pouce et deux trous au-dessus, nous pouvons neutraliser les 3 premiers partiels etg forcer la colonne d'air
à se diviser en 4 parties pour obtenir des notes encore plus aiguës.
Nous utilisons alors le quatrième registre de l'instrument, pour lequel la colonne d'air comporte quatre noeuds de vitesse.
sol aigu (4e registre)
(Cliquer sur l'image pour plus de détails)
C'est ainsi que nous pouvons jouer sur une étendue de 2 octaves et demie (environ 30 notes) avec seulement 8 trous. Le bon fonctionnement du système dépend du profil de la perce, ainsi que de la position et du diamètre des trous.